DOMUNI UNIVERSITAS

Philippe BACQ et Christoph THEOBALD , PASSEURS D'EVANGILE

4 juin 2014 | resena
Philippe BACQ et Christoph THEOBALD , PASSEURS D'EVANGILE

Recension de Philippe BACQ et Christoph THEOBALD , PASSEURS D'EVANGILE, autour d'une pastorale d'engendrement, par Sabine Ginalhac

Philippe BACQ et Christoph THEOBALD , dir., PASSEURS D'EVANGILE, autour d'une pastorale d'engendrement, Paris, Editions de l'Atelier, 2008,

Cet ouvrage collectif reprend et approfondit la réflexion sur la pastorale d'engendrement initiée par le livre «Une nouvelle chance pour l'Evangile, vers une pastorale d'engendrement» paru en 2004. Il se compose de deux volets réunissant chacun les contributions de plusieurs auteurs. Le premier volet a pour objectif de fonder théologiquement la démarche d'engendrement. Le second présente des expériences pastorales concrètes vécues dans différents domaines, - l'aumônerie hospitalière, l'enseignement, le social, les paroisses -, et en propose une relecture à la lumière de la pastorale d'engendrement.

Au point de départ, il y a un parti-pris de lucidité. Notre société, et a fortiori l'Eglise, traverse une crise radicale, un effondrement général des repères qui fait que l'annonce de l'Evangile ne peut pas se faire avec des éléments rapiécés. Mais ce temps de crise peut s'offrir comme un temps de reconstruction, porteur d'une espérance pascale, non seulement d'une Eglise nouvelle mais d'une nouvelle naissance de l'homme, l'homme remis debout, fils de Dieu. La pastorale d'engendrement articule ainsi une vision évangélique du réel et une pratique précise en un lieu et un temps donnés. S'inscrire dans cette démarche, c'est se laisser guider par le Christ unique Passeur et Pasteur pour, dans son sillage, faire passer la manière d'être avant les objectifs à remplir, privilégier la proximité active, la qualité des rencontres, la fraternité vécue et la confiance partagée, accepter avec humilité de «ne pas tout couvrir», rester ouverts à l'imprévu reconnu comme don de Dieu, laisser naître du différent; bref, passer d'une logique d'encadrement axée sur la maîtrise à une logique d'accompagnement «qui se met au service de ce qui est en train de naître». Il ne s'agit pas là d'un énième nouveau concept, mais plus subtilement d' «une tonalité spécifique», dont l'unique visée est de «susciter la vie dans toutes ses dimensions», dans la référence constante aux Ecritures. Et c'est ce que nous voyons concrètement à l'œuvre dans les expériences relatées, des initiatives qui s'enracinent dans une vision évangélique de l'homme et de la société et sont nourries par une conversion permanente du regard et le souffle de l'espérance. Pour autant, les auteurs ne versent pas dans la démagogie en laissant accroire que cette disponibilité à l'Esprit des commencements pourrait se passer du cadre institutionnel. Mgr Rouet rappelle à propos que "l'acte d'instituer […] revient à ceux qui ont charge de gouverner une Eglise locale: l'évêque et ses conseils". La tension entre ces initiatives novatrices au cœur de la vie de tous les jours et l'ancrage plus traditionnel des paroisses ne doit pas être évacuée, mais doit au contraire inciter au souci permanent de la communion et de l'unité du peuple de Dieu.

REGARD CRITIQUE


On est frappé par la cohérence de cet ouvrage, à deux niveaux. Le lien entre le fondement théorique et l'illustration pratique s'impose de façon naturelle, et il en est de même de l'articulation entre les différentes contributions. Il s'agit là d'une œuvre collective de réflexion et d'engagement, une véritable œuvre ecclésiale insufflée par les grandes intuitions de Vatican II sur l'Eglise communion de communautés différentes.

Le lecteur de cet ouvrage reçoit l'authenticité et la justesse de la parole de chacun des auteurs comme un fruit de cette audace évangélique dont ils sont à la fois les passeurs et les témoins, à la suite de Celui qui s'est approché des hommes de son lieu et de son temps pour rallumer en eux la flamme de l'Espérance et qui, par sa Présence à notre humanité, a fait advenir le Royaume de Dieu sur cette terre de Galilée à l'aube de notre ère. Il accueille ce Souffle et se sent lui-même invité à s'inscrire dans ces dynamiques de vie, à se mettre en route sur ces «chemins de fraternité et d'humanisation», à oser l'aventure spirituelle, confiant que c'est Dieu qui engendre à la vie et qui bâtit l'Eglise.
 

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