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Israël, le rêve inachevé Quel Etat pour le peuple juif ?

22 novembre 2019 | resena
Israël, le rêve inachevé Quel Etat pour le peuple juif ?

Auteur: Pierre LURCAT

L’année 2018 a célébré la Déclaration d’indépendance de l’État d’Israël, proclamée le 14 mai 1948, et sa naissance parmi les nations. Pierre LURCAT, qui vit actuellement à Jérusalem, nous propose de revisiter l’histoire de ce pays et le chemin parcouru. L’auteur ne cache pas ses sympathies pour la droite israélienne. Bien au contraire, il dresse un bilan plutôt positif, louangeur, et presque hagiographique de l’aventure sioniste en Eretz Israel. On sent bien dans sa relecture les soubassements qui soutiennent sa pensée, et la veine droitiste qu’il partage à n’en pas douter avec l’actuel Premier Ministre de l’Etat d’Israël. Il soutient que l’État juif n’a pas été créé en compensation des malheurs de la Shoah. Pourtant, l’Histoire est bien là et les faits sont têtus.

Selon lui, le chemin n’est pas encore arrivé à son terme. Il y a encore de la route à parcourir et des actions à mener pour que le rêve de Theodor Herzl devienne pleinement une réalité… ; et c’est bien le titre de cet ouvrage « Israël, le rêve inachevé ». Selon Pierre LURCAT, excepté les affaires relevant du Droit de la Famille, les Droits anglais et ottoman restent toujours d’actualité. Cela est vrai pour ce qui concerne aussi les affaires religieuses qui se réfèrent toujours au Document appelé « Statu Quo ». Les Lois bibliques devraient, selon lui, avoir une plus grande place au cœur de la vie israélienne comme points de référence. Il propose également (ce qui n’est pas étonnant) une plus grande connaissance de la pensée de Vladimir Jabotinsky. Ici, il faut nous souvenir que l’actuel Premier Ministre, Benyamin Netanyahou, avait en grande admiration son père Benzion Ze’ev Netanyahou, qui était ni plus ni moins que le secrétaire du penseur sioniste révisionniste. Benyamin Netanyahou a entendu durant toute sa jeunesse que (dixit son père) : « L’Arabe est un ennemi par essence. Sa personnalité ne lui autorise aucun compromis ni accord. Peu importe la résistance qu’il rencontre, le prix qu’il a à payer, son existence consiste à être perpétuellement en guerre. Aucune paix ne peut surgir d’un accord ». Si « l’Arabe » accepte la paix, ce ne peut être que par fourberie, le temps de retrouver des forces pour reprendre la guerre. Et de poursuivre : « La solution à deux Etats n’existe pas. Ici, nous n’avons pas deux peuples. Nous avons un peuple juif et une population arabe. Il n’y a pas de peuple palestinien. On ne va donc pas créer un État pour une nation imaginaire. Ils s’intitulent eux-mêmes “un peuple” dans l’unique objectif de combattre les juifs ». (cf. Edition du quotidien Maariv, du 3 avril 2009). On voit bien comment alors ce rêve devrait s’achever… L’influence des thèses de Vladimir Ze’ev Jabotinsky et celles de son père contribuent, comme elles le firent chez un autre Premier Ministre Menahem Begin, à déployer une politique unilatérale juive pour les Juifs où l’autre est à la marge, ou encore du champ possible d’une entente avec les Palestiniens.

Les écrivains et des personnalités de l’époque sont à la tâche. Certains, d’ailleurs, prendront les armes pour que ce rêve puisse se réaliser. Citons en quelques-uns : Rachel Blaustein, Arik Einstein , Amos Kenan, Haïm Gouri, Amir Gutfreund, Itshak Shamir, Yehoshua Kenaz, Aharon Megged, Avraham Stern, Peter Bergson, Albert Stara et David Shahar. Ces figures israéliennes des premiers instants donnent une certaine beauté à l’entreprise et incarnent bien la vie de ces femmes et de ses hommes qui portaient haut l’utopie qui les faisaient se battre au risque de leur vie.

Cependant, pour autant qu’on puisse le lire et à force de vouloir s’en convaincre, on ne trouve pas dans ce livre une vraie volonté pacifiste pour trouver une porte de sortie honorable et juste entre les deux belligérants. Sans doute l’auteur ressent-il ce chemin comme une utopie plutôt que de la voir comme un chemin véritable et nécessaire… On aura bien compris que cet ouvrage est aux antipodes de la relecture des dits « nouveaux historiens » ; tels que Noam Chomsky, Illan Pappé ou Shomo Sand.

Ce livre qui, dans la troisième partie, aborde également des questions brûlantes d’actualité est bien documenté, ouvre des champs de lecture intéressants qui mériteraient sans doute plus de nuances et plus d’objectivité (cf. la bibliographie est monocolore). Il est vrai que dans cette histoire turbulente, et au cœur du conflit qui anime ces deux peuples, il n’est pas facile d’être impartial tant les passions et les attentes sont vives. Chacun se fera donc une opinion.

 

Patrice SABATER,

Octobre 2019

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