DOMUNI UNIVERSITAS

«Et le désert refleurira»

1 août 2017 | resena
«Et le désert refleurira»

Interview du père Jean-François Arnoux, auteur de «Et le désert refleurira», publié chez Domuni Press.

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Le père Jean-François Arnoux est l'auteur de « Et le désert refleurira » publié chez Domuni-Press en mars 2016.

Il nous raconte son témoignage spirituel intense.

 

 

 

 

 

1. Pourriez-vous nous raconter comment vous avez commencé à écrire ?

Le livre « Et le désert refleurira » a été conçu et pensé alors que j'étais en chambre stérile au service d'Hématologie du CHU de Dijon.
J'avais un cahier et un stylo pour noter les événements que je vivais, mes pensées, mes questions, mes prières.... Or, pendant ce temps de claustration forcé, j'ai vécu une expérience spirituelle intense. J'ai reçu la grâce de l'abandon, de la paix, de la joie. J'attribue ce superbe « cadeau » qui m'a été fait à l'amour et à la prière des gens qui m'aiment. Donc, ce n'est pas moi qui en suis la source, mais les autres et la grâce de Dieu. Je me suis donc senti « obligé », d'envoyer un « retour » à tous ceux qui m'ont soutenu d'une manière ou d'une autre ; d'où l'idée d'écrire ce livre pour témoigner de ce que j'ai vécu et faire savoir que « la communion des saints », ça existe ! Et non seulement ça existe, mais c'est à la portée de tout le monde !

2. Quelles sont vos sources d’inspiration ?

Ma première source d'inspiration est tout simplement ma prière et ce que je reçois de Dieu quand je l'écoute. Les psaumes de la Bible sont une composante très importante de ce que Dieu me dit chaque jour : je les ai priés, remâchés, accueillis avec cette conjoncture particulière de ma maladie, de ma fragilité, de ma pauvreté, qui me les a fait savourer d'une façon très « existentielle ».
Par ailleurs, avant d'entrer en maladie, j'ai lu un livre qui s'intitule : « La fragilité de Dieu selon Maurice Zundel » de Ramon Martinez de Pison Liébanas édité chez Bellarmin en Février 1996. (aujourd'hui épuisé).
Je suis, depuis longtemps, très marqué et très demandeur de la pensée de Maurice Zundel, qui éclaire de façon particulière la manière de « voir » Dieu, le Dieu de Jésus-Christ. Ce livre, confronté à la Parole de Dieu, très présente en moi pendant ce temps de maladie, confronté à mon vécu de malade, a produit ce « mélange » intérieur qui a été ma principale source d'inspiration, ainsi que les Pères du désert et les pères de l'Église, toujours très présents dans mon cœur et ma pensée...
Par ailleurs, ma vie, mes préoccupations, ma vie de prêtre dans l'Église catholique dont je suis et veux être un membre actif, ont été des sources d'inspiration. Dans le silence de la chambre d'isolement, bien des pensées se sont imposées à moi et j'en ai donc fait part tout naturellement à mes futurs lecteurs. Car si une maladie physique s'est abattue sur moi, les événements qui touchent l'état de santé de « notre Église », sa vie, sa survie, me touchent particulièrement : je fais des constats et propose des chemins... Je me garderai de penser que je possède toute la vérité, mais je ne mets pas de limites aux « rêves » que je fais, pour qu'on en parle entre prêtres et diocésains (et si possible, avec l'évêque...) pour faire avancer les choses, écouter, débattre, proposer du nouveau, sortir des scléroses et des pastorales obsolètes, laisser parler l'ESPRIT ! C'est cela : il faut laisser parler l'Esprit, et, l'ayant laissé parler, l'accueillir et agir en conséquence sous sa conduite, quels que soient les chemins qu'il nous demande de prendre : c'est l'aventure de la foi : "et Abraham partit sans savoir où il allait » (Hébreux 11 : 8) C'est cela qui est beau, mais nous fait terriblement peur ! J'ose donc dire que l'Esprit, à travers tout ce que je viens de dire, est ma principale source d'inspiration !

3. Comment savez-vous, décidez-vous qu'un manuscrit est achevé ?

En ce qui me concerne, les choses ont été relativement rapides : j'ai fait mention des principales étapes de ma vie et de ma maladie et j'ai senti qu'il fallait s'en tenir là, à ma sortie de l'hôpital et dans les premiers balbutiements de ma vie de convalescent. L'étape suivante serait la consolidation de mon état de santé et un avenir qui, nécessairement m'échappe. Donc, l'essentiel était dit ! Par ailleurs, je ne voulais pas trop « me raconter » comme si j'étais une vedette. L'essentiel étant le message de foi que j'ai voulu transmettre dans cette circonstance particulière de ma maladie.
J'ai eu envie, par la suite, d'écrire à nouveau, dans la lancée, sur des sujets qui me tiennent à cœur, compte tenu d'un dynamisme étonnant qui m'a été donné dans le creuset de ma maladie. J'ai commencé quelques chapitres... mais j'ai finalement renoncé à le faire pour le moment. Je sais ce que je veux dire, mais le moment n'est pas encore venu : c'est un déclic intérieur qui viendra « si Dieu le veut », ou qui ne viendra pas.

 

 


4. Quel message voulez-vous transmettre à vos lecteurs à travers votre ouvrage ?

J'ai voulu dire que c'est possible d'être malade et profondément heureux. J'ai voulu dire que c'est possible d'accepter la mort, non comme une calamité ou la fin de tout, mais comme la porte ouverte sur l'infinie beauté de Dieu. Par ailleurs, la pensée d'une mort éventuelle fait découvrir ou redécouvrir d'une façon extraordinaire, la merveilleuse beauté et grandeur de la vie. Dire que ceci rend libre, léger, disponible. Pour cela, il faut accepter, « lâcher prise » s'abandonner ; ce qui ne veut pas dire du tout qu'il ne faille pas se soigner et rien faire pour guérir ! Au contraire !
J'ai voulu dire que les événements inattendus et peut-être douloureux, peuvent être des tremplins pour aller plus loin, plus haut dans l'amour, la communion des saints, la prière, l'action de grâce... J'ai voulu dire toute l'importance des proches, des amis, de la famille, des liens intérieurs qui nous unissent les uns les autres et qui littéralement nous « portent ». Comme le paralytique de Capharnaüm porté aux pieds de Jésus par ses proches, alors que lui-même ne dit rien et se laisse faire ! Il est porté par l'amour et par la foi des autres. Il se retrouve alors pardonné de tous ses péchés et en pleine forme physique ! (Matthieu 5 : 17-26)
J'ai voulu dire des choses sur la beauté de l'action des médecins, du personnel hospitalier, mais aussi sur leurs limites, dues en partie, selon moi, à l'excès de travail, à une certaine conception de la « rentabilité » qui leur est imposée et qui se fait au détriment de la communication et de la proximité. Un malade a toujours besoin d'écoute, d'attention, il a besoin de comprendre certaines choses et d'être rassuré, tout en ayant droit à la vérité sur ce que la médecine - dans l'état actuel des choses, perçoit de son état.
J'ai voulu dire qu'on peut être malade et profondément vivant et j'en suis un témoin. J'ai voulu dire la proximité et l'incroyable amour de Dieu... et que « tout est possible à celui qui croit ».
J'ai voulu dire aussi, en parlant de l'Église, que, comme toute société, toute vie communautaire, qu'elle soit associative, religieuse, syndicale, politique, conjugale, est « en état de grâce » et de fécondité quand elle sait écouter, dialoguer, se laisser remettre en question, sans être figée sur certaines « traditions » obsolètes, décalées et inopportunes pour la vie des gens. Là encore, il s'agit de se laisser conduire par l'Esprit, qui n'a jamais peur de nous conduire par des chemins nouveaux et pleins de vie !

Par ailleurs, j'accueille volontiers et je respecte les gens qui ont « du mal à croire ». J'irai même jusqu'à dire que je peux les comprendre compte tenu des difficultés, des erreurs et des contre témoignages de ceux qui prétendent croire et j'en fais sans doute aussi partie parfois... ! Il y a tant de malentendus et de réalités diverses, voir contradictoires, sous les mêmes mots employés... Mais je prétends que c'est l'amour qui nous sauve et que chaque être humain en vit au moins un peu ! Pour moi, « l'amour » est un autre mot pour dire Dieu et l'amour n'est pas réservé à une catégorie de gens qui se diraient « croyants » ... Il reste que le compagnonnage quotidien avec la personne du Christ et en Église est un trésor irremplaçable que je souhaite au plus grand nombre.
Car c'est le Christ, par son Esprit, qui nous dit de l'intérieur, des choses personnelles et profondes sur qui Il est, qui nous sommes et ce que nous avons à faire. C'est Lui qui « ouvre notre esprit à l'intelligence des Écritures » et, comme pour les pèlerins d'Emmaüs, « notre cœur devient tout brûlant. » (Luc 24 : 32). C'est Lui qui nous configure à Lui si nous le voulons bien comme l'écrit Saint Paul : « Je vis, mais ce n'est plus moi qui vis, c'est le Christ qui vit en moi ». (Galates 2 : 20). Et ceci devient une source intarissable de joie et de découvertes...

En ce sens, mon livre est inachevé car j'ai encore beaucoup à dire et çà écrire là-dessus ! Je ne cherche pas à convaincre, je veux seulement être un témoin qui dit que c'est possible, que ça existe, parce que je le vis !
 

 


Jean-François Arnoux, né en 1944, est prêtre du diocèse d’Autun-Chalon-Mâcon.

Le désert qu’il a traversé, c’est celui de l’aplasie médullaire idiopathique, une maladie orpheline qui l’a contraint à vivre plusieurs semaines « en milieu stérile ». C’est là qu’il a couché ces pensées sur Dieu, la prière le dialogue, l’Église et sa mission d’évangélisation… en les faisant précéder du récit autobiographique de son combat avec la souffrance.
 

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