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"Ne nous oubliez pas!", par Louis Raphaël Sako

17 avril 2015 | resena
"Ne nous oubliez pas!", par Louis Raphaël Sako

Recension de "Ne nous oubliez pas!", de Mgr Louis Raphaël Sako, patriarche chaldéen de Bagdad, par Patrice Sabater, cm

Irak, des mots pour le dire...


Laurence DESJOYAUX, « Ne nous oubliez pas !" : le SOS du Patriarche des chrétiens d'Irak. Préface du cardinal Philippe Barbarin. (Entretien). BAYARD Editions, collection Etudes et essais (Montrouge, février 2015), 155 pages. 16,90 €


 

Comprendre. Essayer de comprendre ce qui nous semblait être d’un autre âge fut une tâche lourde, pesante et difficile durant les soixante-dix dernières années. L’humanité, avec le deuxième conflit mondial et la bombe d’Hiroshima, avait pensé toucher le fond. On ne pourrait pas aller plus loin et descendre plus bas. Or, l’actualité de cette dernière décennie appelle à réfuter cette doctrine. Des mots viennent le dire et même le crier tout simplement. Ils sont ceux du Patriarche chaldéen de Bagdad, Sa Béatitude Louis Raphaël Sako 1er.
Ses pages font suite à d’autres paroles vives de Mgr Elias Chacour, de Mgr Georges Casmoussa, du Père Manuel Mussallam ou de Joseph Fadelle. Ses paroles sont toutes des invitations à ne pas demeurer dans le silence mais dans l’action pour que soit honoré le Nom du Christ, le nom de « chrétien » qui nous vient, ne l’oublions pas, d’Antioche !
Dans un long entretien publié chez Bayard, Mgr Sako raconte son pays, la chute de Saddam Hussein, la vie quotidienne des gens vivant un quotidien si compliqué, les attentats, l’entrée de DAESH, la peur, le meurtre..., et l’exil. Dans ses pages, on ne trouvera pas une peur chevillée ni de radicalisation. Bien au contraire, comme le souligne le Cardinal Philippe Barbarin dans sa Préface, Mgr Sako est un homme de paix, de justice, de concorde. « Deux fois, j’ai été témoin de l’appel de députés musulmans – une femme chiite et un homme sunnite – exprimant tout ce qu’ils devaient aux chrétiens et les suppliant de rester : « Nous avons de vous. Notre pays ne pourra pas se reconstruire sans les chrétiens ». La trame de ce livre semble être triple. Tout d’abord, le Patriarche essaye de lire les événements tels qu’il les a vécus et tels que les Irakiens les ont vécus. Il le fait sans humeur, sans trouble et sans excès. Il fait défiler les événements en leur donnant la couleur de la vérité. La deuxième intention de ce livre pourrait se situer dans une volonté de montrer combien ce pays est à la racine de l’Humanité et aux fondements du christianisme. Ainsi, attenter à l’Homme irakien, aux traces des nombreuses cultures qui se sont croisées dans le dialogue et les tensions durant des siècles, c’est, selon lui, attenter à l’âme même de l’Irak sise entre le Tigre et l’Euphrate. Même s’il y a sans doute « un prix à payer » pour rester sur ces terres, il ne condamne pas ceux qui partent mais essaye d’appeler ses frères et sœurs à l’espérance : « Regardez Jonas, puisque Mossoul est la Ninive de la Bible. Regardez Jonas, il a été englouti par le gros poisson, puis il a été délivré, il est sorti du ventre de la baleine. Demeurez dans l’espérance ». Le Patriarche de Bagdad est un homme honnête et juste, un sage, et un homme de conviction enraciné dans une foi inébranlable ; si bien que les musulmans qu’il fréquente eux-mêmes l’estiment. Pourquoi ? Parce qu’il dit toujours la vérité, sans heurter, en posant des actes concrets sur des paroles qui jaillissent de son cœur. Il est un père ! Enfin, ce livre est un appel à l’Occident. Il n’est pas homme à crier, mais sa parole résonne bien comme un cri ; celui de son livre : « Ne nous oubliez pas ! ». Les mots qui défilent à la lecture de cet entretien sont une invitation à soutenir par le cœur, par la prière, par l’engagement personnel quel qu’il soit, les chrétiens d’Irak pour les aider à rester sur leurs terres ou à y revenir. Bien évidemment, au-delà de l’Irak, nos regards se tournent vers d’autres pays, telle la Syrie qui lutte comme elle peut contre des vents contraires et surtout contre DAESH.
On ne perdra pas son temps en essayant de comprendre la nature et l’urgence d’un cri : celui d’un frère d’Orient, Père pour ses Fils. Il nous invite à entrer en mouvement et en paroles visibles de solidarité. Là sera notre soutien.

Père Patrice Sabater, cm
Le 16 avril 2015


 

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